mardi 30 juillet 2013
La 3è chronique d'Olivier...
Chronique III : 29
Juillet 2013 // L’effacement, Compagnie Brut de Béton
Propos :
Comme
des millions de « petites vieilles », Marie-Line a une histoire.
Comme pour des centaines de milliers d’entre elles, cette histoire disparaît
irrémédiablement. Marie-Line a de bonnes raisons de vouloir oublier ce monde.
Il ne ressemble en rien à celui qu’elle avait construit durant le XXe siècle à
travers ses « résistances ».
Alors, elle nous fait un dernier
« tour de piste » pour se montrer avant de s’égarer définitivement.
Restes de chansons, bouts de phrases, réminiscence de mouvements, voilà ce qui
lui permet encore d’être là.
Beckettienne malgré elle, Marie-Line s’efface
dans une certaine joie.
La chronique d’Olivier :
Bonsoir,
En ouverture de cette chronique,
j’aimerais vous poser une question qui, selon l’expression consacrée, me brûle
évidemment les lèvres, mais
surtout, me taraude frénétiquement
l’entendement.
Qu’est-ce-que vous faites
là ?
Je veux dire, ce qui me
plairait de savoir, c’est pourquoi, sans y être manifestement contraints,
choisir de venir voir un spectacle sur la vieillesse, car vous l’aurez compris,
L’effacement ne traite évidemment pas
de la problématique de la dette grecque mais bien-sûr de ce stade ultime de
l’existence où, sans être encore tout à fait un fantôme, on ressemble déjà
manifestement à une sorte d’oubli.
Non, sincèrement, j’aimerais
connaître la raison de votre présence ce soir, parce que, voyez-vous, moi, par
exemple, je fais partie de ces gens que la vieillesse répugne. Et oui, je n’ai
pas honte de le dire, la vieillesse me dégoûte, avec tous ses pathétiques
tremblements, son cortège de plis adipeux et ses incontinents filets de bave
qui viennent s’écraser dans un bruit mou sur des charentaises poisseuses et
avachies. Beurk ! Quel manque de dignité que la vieillesse.
A mon âge, même si j’affiche
ce port altier et ce teint frais que m’envient les premières communiantes, je
ne supporte plus du tout l’idée du temps qui passe. La simple vision d’une date
de péremption sur un pot de yaourt me plonge irrémédiablement dans une profonde
mélancolie.
Du coup, je m’adapte. Je ne
bois que du Beaujolais Nouveau, ne vais voir que des films de Mickael Young et
ne ris qu’aux blagues d’Olivier Lejeune.
Et n’allez surtout pas
croire, je vous en prie, qu’il s’agisse là d’une quelconque forme de lâcheté,
non point. Je ne crains, par exemple, tel que vous me voyez, nullement la mort…
des autres. Non, blague à part, la mort ne m’effraie pas plus que ça. La mort,
convenez-en, est mille fois moins anxiogène que la vieillesse. La mort, c’est
franc, c’est direct, ça arrive et hop, on part direct bras-dessus bras-dessous
en voyage de fosse.
Alors que la vieillesse, vous
serez d’accord, c’est sournois, ça s’immisce à l’insu de notre plein gré et ça
peut vous ronger la couenne, comme un cancer, pendant plusieurs dizaines
d’années.
Jacques Brel avait raison.
Mourir, la belle affaire. Mais vieillir, ah, vieillir. D’autant que le problème
avec la vieillesse, c’est de savoir quand elle commence.
Les sciences à ce jour
restent totalement impuissantes à cerner l’instant précis où l’homme bascule
vers le début de sa fin. La littérature ne nous renseigne guère plus.
Pour Eugène Ionesco, par
exemple, si l’on en croit son Journal en Miettes, la vieillesse attaquerait
dès la fin de l’enfance. « Tout va bien, écrit-il, tant qu’un quart
d’heure de récréation est interminable, tant qu’on a le temps durant ce quart
d’heure d’avoir l’idée d’un jeu, de le jouer, de le finir et d’en recommencer
un autre. C’est alors le monde qui tourne autour de vous, puis un jour, au
début de l’adolescence, on ne sait pas trop pourquoi, on bouge, on fait un pas,
puis un autre, et on se met à courir, courir après les choses, courir avec les
choses, alors on coule ».
Pierre Desproges, quant à
lui, datait son vieillissement personnel du moment où, disait-il, il avait
constaté qu’il commençait à s’essouffler dans les pentes trop dures ou les
femmes trop molles. Bon ici, en Auvergne, étant franchement dotés ni des unes
ni des autres, cette scientifique observation ne nous est d’aucun secours pour
traquer notre éventuel début de compte à rebours personnel.
Et que dire de Victor Hugo
qui lui, carrément, affirmait qu’il suffit à un homme de naître pour être assez
vieux pour mourir.
Mais je parle, je parle, et
les aiguilles tournent et vous ne m’avez toujours pas dit ce que vous veniez
chercher ce soir en venant assister à ce spectacle, L’effacement. J’en déduis donc que, soit vous faites partie d’un
voyage d’études Modavio-ukrainiens et que vous ne comprenez pas un traître mot
de ce que je vous raconte depuis 5 mn, soit votre silence est une délicate et
pudique façon de me dire qu’il n’y a tout simplement pas de réponse à la raison
de votre présence, pas plus qu’à la mienne d’ailleurs.
N’en déplaise au grand
William, « to be or not be » n’a peut-être aucun sens et que la seule
question qui vaille vraiment c’est « comment » être ou ne pas être.
Et à vous voir là, tranquillement assis ensemble, apaisés, peut-être même
heureux, vous donneriez presque envie.
Peut-être est-ce vous qui
avez raison.
Peut-être que la meilleure
façon de se tenir, après tout, à l’écart de la vieillesse, c’est, comme vous,
de savoir prendre son temps.
Prendre encore le temps de
s’émerveiller de ce cadeau fou et incompréhensible qu’est la vie juste pour le
plaisir de rire, de pleurer, de s’émouvoir.
Alors oui, venir au spectacle
pour contempler, une fois encore, avec L’effacement,
la beauté d’une fin de vie juste parce que c’est encore de la vie, au même
titre que la fin d’une histoire d’amour, c’est encore un petit bout d’une
histoire d’amour.
Oui, vous avez sans doute
raison, courir après le temps, comme le lapin d’Alice au Pays des Merveilles,
ce n’est pas vivre, alors, allons lentement puisque nous sommes pressés, et
vivons.
Je deviendrai vieux, vous
deviendrez vieux, et alors, on retombera tous enfin en enfance, on retrouvera
notre quart d’heure infini de jeux dans la cour de récréation, on rira sans
plus se soucier du temps, la mort essaiera de nous attraper et nous, on lui
tirera la langue, juste comme ça pour la narguer, pour lui faire comprendre
qu’on est trop rapide pour elle et qu’elle ne nous aura jamais vivants. Bonne
soirée.
vendredi 26 juillet 2013
Les chroniques d'Olivier, II...
Chronique II : 24 Juillet 2013 // Les Labrènes, Tomasso Landolfi, Lecture de Jean-Marc Bourg
Propos :
Nouvelle surréaliste,
voire absurde, Les Labrènes nous plonge dans un univers proche de La
métamorphose de Kafka. Le narrateur assiste à son propre enterrement et, alors
que le maçon scelle la pierre tombale, le voilà revenu au grand air pour porter
un regard nouveau sur sa famille.
Disparaître, c’est aussi faire de la place
aux autres, et les revenants ne sont pas toujours accueillis avec bonheur. De
quoi développer aisément suspicion et paranoïa. Et lorsque tout va de mal en
pis, les labrènes apparaissent…
Les lecteurs de Nicolas Bouvier se souviennent peut-être
du terrible combat entre les fourmis et les termites, dans son roman Le
poisson-scorpion, lu au jardin du muséum par un certain Jean-Marc Bourg !
La chronique d’Olivier :
Bonsoir,
En ouverture de cette
chronique, j’aimerais vous poser une question qui, selon l’expression
consacrée, me brûle évidemment les lèvres,
mais surtout, me taraude frénétiquement
l’entendement :
Qu’est-ce-que vous faites
là ?
La question ne s’adresse
évidemment pas à nos amis séniors, qui, ayant lu sur le programme «les labrènes »
s’imaginent sans doute, les pauvres, pouvoir tromper leur ennui de vieux en assistant à une conférence sur les
insectes et autres bestioles rampantes dans l’interminable attente de septembre, date à laquelle, reprendront enfin les projections de « connaissance du
monde ».
Non, la question, le
« que faites-vous là ? », s’adresse aux autres, à tous ceux qui,
dans la force de l’âge, pourraient occuper cette douce soirée d’été à de sensuelles
et bouleversantes occupations.
Moi par exemple, dès que j’en
aurai fini avec cette chronique, je pars retrouver ma chère et tendre avec
laquelle j’espère bien pouvoir me livrer à quelques délectables prouesses
corporelles qui, et je m’en excuse par avance, risquent fort de contribuer gravement
au réchauffement climatique.
Mais vous ? Vous, qui
n’êtes ni chroniqueur ni vieux, pourquoi donc êtes-vous là ?
Je veux dire, quelle lubie vous
a pris pour venir, de votre plein gré j’imagine, assister à une lecture de
l’œuvre de Tommaso Landolfi, « Les labrènes », remarquez que j’ai
bien dit « quelle lubie vous a pris » et non pas « quelle mouche
vous a piqués ? », hein, sinon
tout de suite les vieux « alors c’est sur les insectes ou c’est pas sur
les insectes ? ». Non, et définitivement non !
« Les labrènes » ne parlent pas d’insectes,
mais de l’humain, et même plus précisément d’une caractéristique qui nous différencie justement et à jamais du
règne animal, à savoir notre incroyable et irrépressible capacité à nourrir ce
qu’il est convenu d’appeler de la suspicion.
Oui, Mesdames et Messieurs,
la suspicion, ce délire interprétatif, construit sur une perception faussée du
réel, qui peut conduire chacun d’entre nous dans les affres délirants et sans
retour de la spirale paranoïaque.
D’autant que l’époque, pleine
de doutes et de défiance, n’a jamais été aussi propice à la contamination généralisée de cette horrible suspicion
chez les uns et les autres.
Il suffit d’ouvrir un journal
pour constater, vous en conviendrez, que
la défiance est même le moteur principal de l’actualité contemporaine. Défiance
vis-à-vis des modèles économiques, défiance vis-à-vis des représentants
politiques, défiance vis à vis des
autres cultures, des autres religions etc…etc. On en vient même, folle
extrémité, à suspecter la présence de coureurs sains chez les drogués du Tour
de France.
Mais si la suspicion peut
s’immiscer dans la plénitude du vaste champs des relations humaines, elle n’est
jamais aussi douloureuse et dévastatrice que lorsqu’elle prend place dans le
doux et néanmoins fragile cocon des relations amoureuses.
Tiens, un petit test :
Qui parmi vous est totalement assuré de la fidélité de sa compagne ou de son
compagnon ? Allez-y, n’ayez pas peur levez la main on est entre nous.
Voilà, à par deux mythomanes,
force est de constater que la suspicion guette potentiellement chacun d’entre nous.
Et comment pourrait-il en être autrement ?
N’y a-t-il de plus grand
supplice, pour le commun des mortels, que d’imaginer l’être aimé, l’être à qui on eut donné de l’or et des
bijoux comme disait l’autre, pour qui on eut vendu son âme pour quelques sous
même, et bien de l’imaginer, cet être-là justement, défaillir de plaisir sous
les libidineuses et animales caresses d’une personne étrangère.
Enfin étrangère, mais que vous connaissez la plupart du temps, et
dont vous ne vous êtes jamais méfié tant sincèrement vous n’auriez jamais
imaginé que le potentiel de séduction puisse attirer autre chose qu’un
coléoptère aveugle et à moitié déprimé. Je sais les anciens, j’ai dit
coléoptère, mais je vous assure que c’est vraiment pas le sujet, ça suffit
maintenant.
Quand la suspicion s’installe, disais-je, tout
s’explique soudain, tout devient évident. Il ne vous manque que la preuve de la
haute trahison, car sinon tout concourt à renforcer à chaque seconde vos
soupçons ; les mots de l’autre sentent désormais irrémédiablement la duplicité à plein nez et ses
silences sont carrément des aveux.
Oui, c’est clair, vous êtes
sans conteste la victime d’un perfide et machiavélique complot, « on vous
ment, on vous trompe » comme le faisait déjà remarquer en son temps une
certaine Arlette, ça crève les yeux comme on dit, mais ils ne savent pas à qui
ils ont à faire ha ! ha !, et leur misérable duplicité va leur coûter
très cher. L’heure de la vengeance a sonné et croyez-moi, ça va saigner.
Voilà, la mécanique fatale est
enclenchée, le système paranoïaque est en place, et l’inévitable peut désormais
advenir.
C’est à ce genre de folie
proprement humaine que vous êtes venus assister au travers de la nouvelle de
Tommaso Landolfi intitulée« les labrènes ».
Alors oui peut-être suis-je finalement
en train de comprendre la raison de votre présence ici.
Bien sûr, vous êtes venus constater
une fois encore l’incroyable fragilité d’une histoire d’amour, cette chose si
précieuse sans laquelle, pour paraphraser Nietzsche, la vie ne serait qu’une
faute, une erreur.
Et je crois surtout que je
viens de comprendre la présence des plus âgés parmi vous. Vous êtes venu
savourer les pièges de la vie, dans lesquels vous avez eu l’élégance de ne pas
tomber, histoire d’avoir fait tout ce chemin
juste pour le plaisir quasi enfantin de susurrer à l’oreille de votre
douce et, espérons-le, éternelle
moitié, les bouleversants mots de
Jacques Brel : « oh ! Mon amour, il nous fallut bien du
courage, il nous fallut bien du talent pour être vieux sans être adultes,
oh ! Mon amour, mon doux, mon tendre, mon merveilleux amour, je t’aime
encore, tu sais, je t’ai-ai-me ». Belle soirée.
Retrouvez les Chroniques d'Olivier dans le cadre des Contre-Plongées de l'Eté !sur le blog
Chronique I : 22
Juillet 2013 // Shitz, Hanock Levin (Cie Show Devant)
Propos :
Bienvenue
chez les Shitz !
Voici le père, Shitz, entrepreneur de travaux publics
qui fait fructifier sa petite entreprise en profitant de la guerre.
Voici la
mère Setcha, femme au foyer et épouse modèle qui rêve d’Amérique.
Voici la
fille Spratzi qui attend un homme, en se goinfrant de cacahuètes.
Les parents
veulent marier la fille, la fille veut un mari, alors voilà Tcharkès, le gendre
presque providentiel, plus attiré par l’opulence du portefeuille de Shitz que
par les rondeurs de Spratzi.
Une fois le mariage âprement conclu, Tcharkes n’a
plus qu’une idée en tête, faire disparaître le père. Les affaires sont les
affaires !
Un texte cru et cruel où les valeurs morales ont déserté le
terrain !
La chronique d’Olivier :
Bonsoir,
En ouverture de cette
chronique, j’aimerais vous poser une question qui, selon l’expression consacrée,
me brûle évidemment les lèvres, mais
surtout, me taraude frénétiquement le
bulbe rachidien :
Qu’est-ce-que vous faites
là ?
Non, parce que pour moi, je
sais. Si je suis présent ici, ce soir, pour faire cette chronique, et je n’ai
pas honte de le dire, c’est clairement pour l’argent.
Si j’avais eu le choix,
j’aurais préféré évidemment, être nonchalamment accoudé à la rambarde d’une
somptueuse terrasse privée dominant la ville, une coupe de champagne à la main,
en train de parler avec une beauté incendiaire saturée de sensuels désirs,
plutôt qu’avec vous, déroutant
conglomérat humain que la convention m’oblige à appeler public.
Ne m’en voulez pas, mais je
préfère être honnête avec vous, en ce qui me concerne, comme je vous le disais,
je suis ici uniquement pour gagner ma vie.
Même si, il faut bien le
concéder, la chronique, c’est très mal payé, à peine de quoi couvrir les frais
de location du costume. Pour tout dire, quand je vois ma rémunération, je
comprends mieux l’expression « défrayer la chronique ».
Mais baste, ce n’est pas le
sujet, revenons, si vous le voulez bien, à la question initiale, à savoir
« qu’est-ce-que vous faites ici ? »
Je veux dire, pourquoi avoir
choisi le théâtre alors qu’il y a certainement, en cette période estivale, un
feu d’artifice tiré au-dessus d’un de nos légendaires lacs volcaniques, et que
la location des chaussures est offerte par le bowling tous les lundi en cette
période estivale, et ce, dès la 5ème partie achetée.
Alors, hein, je vous le
demande, pourquoi le théâtre ?
Victor Hugo, en son temps,
écrivait que lui se rendait au théâtre pour être diverti, pour être ému et pour
apprendre quelque chose.
Nous ne savons si le
spectacle « SHITZ » d’ Hanock
LEVIN présenté par la compagnie Show Devant saura vous distraire et vous
divertir, toujours est-il qu’il est à peu près certain que, malheureusement,
vous n’y apprendrez rien.
De fait, vous pourrez
constater une fois de plus l’incroyable talent tragique et destructeur que seul
le genre humain sait déployer lorsqu’il s’agit d’assouvir une insatiable soif
de pouvoir et de richesse, fut-elle au détriment définitif de ses plus proches
congénères.
Rien de neuf sous le soleil,
me direz-vous, mais justement, pour ce type de banalité, il suffit normalement de
regarder la télé.
Voyez, par exemple, pas plus
tard que hier soir, je tombe par hasard sur une émission traitant des
irréversibles désastres écologiques qu’entraînent l’ultra libéralisme
triomphant de ce début de XXIème siècle.
Un reporter y interviewait
une très jolie jeune femme, aux traits divinement raphaëliens, du genre que, si
j’avais eu le choix ce soir…enfin bref, une très jolie jeune femme disais-je, et
cadre bancaire de son état :
- « Ne trouvez-vous pas
amoral, lui demandait le reporter, que la spéculation sur le marché des
matières premières ait pour conséquence directe la terrible déforestation au
Brésil de l’irremplaçable forêt Amazonienne. Dans des proportions
vertigineuses, précisait-il, l’équivalent de plusieurs terrains de foot chaque jour ! »
- Si, répondit après quelques hésitations la
vénus du placement financier, avec ce léger trouble dans le regard qui laissait
présager une salvatrice et révolutionnaire prise de conscience, avant finalement
d’ajouter dans un sourire désarmant :
« Mais, en même temps,
la coupe du monde, elle a pas lieu justement au Brésil ? »
Que voulez vous faire,
l’homme est ainsi fait. Il lui est impossible d’établir un dialogue constructif
entre le Dr Jekill et le Mister Hyde qui l’habite.
L’un aspire immodérément à la
beauté du don, au respect des différences, à l’empathie, à l’équité, au
partage, bref à l’amour pendant que l’autre, dans le même temps, se dépense
sans compter pour une orgiesque et irrépréssible satisfaction d’égoïstes et primaires plaisirs
immédiats en ânonnant inlassablement moi, moi, moi….
Et vous en conviendrez volontiers,
la victoire insolente de l’ultra libéralisme aura libéré comme jamais le côté
« hyde », lequel devenu incontrôlable, saccage et massacre tout sur
son passage jusqu’à mettre l’existence même des prochaines générations en
danger.
Et vous, au lieu de vous
rallier au cynisme ambiant généralisé qui invite à ne plus connaître que le
prix des choses au lieu de leur valeur, vous, qui aviez la possibilité d’oublier
tout ça en dégommant des quilles ou en regardant des bombes multicolores
éclater dans le ciel d’été, vous, dis-ais-je, vous préférez venir vous asseoir
ici, au milieu de gens que vous ne connaissez même pas pour suivre un spectacle
de théâtre, et partager ensemble de la pensée et de l’émotion.
Il n’y aurait donc pas que
l’argent et la soif de pouvoir dans la vie ?
Ha, mon Dieu, je défaille.
Serait-ce donc vous, ces derniers des mohicans, qui affirmez solennellement
avec Albert Camus qu’il n’y a pas de honte à préférer le bonheur ?
L’espoir serait donc
permis ? Il y en aurait encore qui ne désespèrent pas de changer la face
du monde ?
Haaaa ! Je ne peux
résister à l’irrépressible envie de me joindre soudainement à vous pour
partager cette folle aspiration.
Attendez-moi, je viens
communier avec vous.
Que le spectacle commence
donc, et, de grâce, n’oublions pas, dans ce théâtre d’un soir, de rêver sans
retenue, car, comme le rappelait Oscar Wilde, aucune région, -fusse-t-elle notre
magnifique Auvergne, n’est digne d’un regard, si le pays de l’Utopie n’y figure
pas.
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